Ces écritures spontanées ont été rédigées dans le cadre du cours Critique de théâtre (L2 – Arts du spectacle, Université de Nanterre).
En mousse, à ressorts… Epais, plat… Large, étroit… Quelques soit sa forme, il reste un matelas, plus ou moins confortable. Il supporte tout, le matelas ! Grands, petits, gros, maigres, bébés, enfants, adolescents, jeunes adultes, vieux aux os pointus… Quel courage !!
Avant tout, il sert à se poser, se reposer, de jour comme de nuit. Mais alors, celui-là, je ne sais pas ce qu’il fait dans cette salle. Il n’est même pas associé à son sommier !! Abandonné au milieu de la jungle étudiante… Je le plains !! Il supporte tous les étudiants de Nanterre.
Sa housse souffre : elle est déchirée à deux endroits sur la largeur… Le quadrillage là, parterre, à attendre que quelqu’un veuille bien venir sur lui. Il ne résiste pas, il s’enfonce. Sa forme initiale s’estompe le temps que le poids diminue, disparaisse. Et comme par magie, il redevient un pavé léger.
Puis le temps passe, plus il semble souffrir. Ses coins se soulèvent, sans qu’il puisse contrôler ses mouvements. Il crie en silence !! Le peu de répit que lui offrent les jeunes le font sourire intérieurement.
Les passages successifs sur lui le déshabillent. La housse tourne et son manque de bras l’empêche de se rhabiller correctement. Il est condamné à subir, passif. Il attend qu’un individu quelconque le balance dans une benne à ordures en centre ville…
Et voilà qu’on lui saute dessus !! Il pourrait crier qu’il hurlerait de douleur. Mais il ne le peut point. Le voilà enfin libéré de ses tortionnaires. Pour combien de temps ? Il l’ignore. Il n’a pas la notion du temps. Etant donné son usage intensif tout au long de la journée, il ne fait même plus la différence entre le jour et la nuit. De plus, il est ébloui par cette satanée lumière artificielle…
Et puis, au bout d’une grosse heure, on découvre que ce matelas a été baptisé : il s’appelle Manuella. Dois-je dire elle, dorénavant ? Oui.
Elle semble an bout de sa vie, Manuella, mais elle ne le dit pas… Il faut préparer ses obsèques, dignes de ce nom. Afin de lui rendre hommage, et pourquoi pas lui décerner la médaille du courage, pour toute cette vie de souffrance. Ah, et lui écrire un discours d’adieu :
“Ma très chère Manuella,
Tu vas me manquer. Tu es, mine de rien, irremplaçable ! Tu m’as supportée pendant tant d’années !! Mais voilà, tout a une fin… La tienne est aujourd’hui, me voici bien triste à présent…
Tu sais, je voulais m’excuser. Parce que je sais que je t’ai fait horriblement souffrir. Pardon…”
Malgré cela, elle reste fière, elle nous nargue. Même si elle a perdu elle est la plus forte. “Subir sans rien dire, ni pleurer”, telle est sa devise.