Cinéma : Pris de court, entre thriller et portrait de famille


Emmanuelle Cuau renoue avec le cinéma, dix après Très bien, merci. Avec Pris de court, elle photographie l’instant T d’une vie de famille. À cette occasion, elle dirige Virginie Efira et Gilbert Melki. En salles dès le 29 mars.

Nathalie, joaillère, s’installe à Paris pour un nouveau travail et une nouvelle vie avec ses deux fils. Mais la direction de la bijouterie change soudainement d’avis et lui annonce que le poste ne sera pas pour elle. Nathalie veut protéger ses enfants et décide de ne rien leur dire. De ce mensonge vont naître d’autres mensonges de part et d’autre. L’engrenage commence…

Aidée de Raphaëlle Desplechin et d’Eric Barbier, Emmanuelle Cuau signe un remarquable film à suspens. Elle oscille être drame et comédie, sans jamais tomber dans le pathos. Le scénario est très bien ficelé. Le spectateur est dans l’impossibilité d’imaginer la suite, même s’il la devine parfois. Pris de court traite du dépassement de soi, de la capacité des mères à franchir la ligne rouge afin de sauver leur progéniture, mais aussi de l’adolescence, où le jeune est fragile et en quête d’identité. Rien n’est laissé au hasard par les auteurs. La souffrance de Paul, 15 ans, se matérialise par ses fréquentations, qui lui donnent l’importance qui l’attend. Celle de Bastien, 8 ans, est caractérisée par ses maux de ventre répétés et par l’une de ses interventions, marquante : “j’aime pas en ce moment”. Il se sent impuissant, comme sa mère, face à la dérive de son grand frère. Les histoires des grands le tourmentent. Nathalie, quant à elle, lâche prise et agit spontanément. Elle a l’instinct d’une louve avec ses louveteaux en danger. Elle ne réfléchit plus (elle laisse à plusieurs reprises son sac sans surveillance, par exemple). Elle se laisse embarquer dans un engrenage incontrôlable (ses mensonges, puis ceux de son fils, et enfin le mal-être du petit dernier) jusqu’au moment où tout dérape. Leur vie bascule, avec un seul objectif : que chacun sauve sa peau. Un seul bémol à souligner tout de même : la fin soulève des questions sans qu’une réponse ne soit apportée. Pourquoi Nathalie réagit ainsi ? Agit-elle sur un coup de tête ? A-t-elle voulu protéger son fils, sa famille, quel qu’en soit le prix ? A préciser que cela n’enlève rien à la qualité du film, prenant de la première à la dernière seconde. D’autant que la réalisation, simple, est efficace, entre point de vue interne et point de vue externe. Le spectateur voit le personnage, ses faits et gestes, ses réactions, puis ce que le personnage voit. L’ensemble de l’œuvre est servie par des acteurs qui crèvent l’écran, de Virginie Efira à Gilbert Melki, en passant par Zacharie Chasseriaud. Ils brillent par leur interprétation juste. Ils parviennent à transmettre leurs émotions avec talent. Virginie Efira est parfaite en mère courage, seule avec ses deux enfants, Gilbert Melki surprend en mafieux, Renan Prévot excelle en adolescent en pleine crise identitaire, et Jean-Baptiste Blanc est touchant en petit frère qui veut faire comme les grands mais qui ne comprend pas tout. Une belle partition jouée à l’unisson !

Entre thriller, comédie, et drame familial, Pris de court dresse le portrait sans fard d’une famille tourmentée. Emmanuelle Cuau parvient à embarquer le public dans une histoire bouleversante. À découvrir dès mercredi prochain !

Pris de court, un film d’Emmanuelle Cuau • Avec Virginie Efira, Gilbert Melki, Renan Prévot, Jean-Baptiste Blanc, Marilyne Canto, Zacharie Chasseriaud, Mireille Perrier… • 1h25 • Sortie le 29 mars 2017.

Pris de court

9.4

Réalisation

9.0/10

Scénario

9.5/10

Dialogues

9.0/10

Interprétation

10.0/10

Pros

  • Un bon scénario
  • D'excellents acteurs
  • Des sujets délicats
  • Un suspens soutenu

Cons

  • Des questions sans réponse

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