Spoiler alert : l’avis contient des informations sur le déroulement et le dénouement du roman.
Avis
Dès les premières pages de The Girl Before, JP Delaney plonge le lecteur au cœur d’un anneau de Möbius. Emma, Jane, Astrid : toutes vivront le même destin, comme si habiter dans cette maison aux règles folles ficelait l’existence de ses habitants. Une double narration se met d’entrée en place, permettant au lecteur de découvrir les vies parallèles des héroïnes, bien que ces dernières n’occupent pas au même moment la construction moderne. Seules les indications au début de chaque chapitre permettent de situer chronologiquement les faits. Cette narration originale entretient le suspens auprès du public : Jane, ayant connaissance de l’horreur vécue par la fille d’avant, subira-t-elle le même sort qu’Emma ?
Cette tension permanente crée une ambiance particulière. La terreur côtoie la perversion. Edward Monkford, pervers narcissique, manipule mentalement ses locataires, ressemblant étrangement à sa femme morte lors de la construction de l’édifice. Il reproduit le schéma sentimental : il l’a aimée, elle est morte, il aime ses locataires, elles meurent. Décrit comme un sociopathe, il isole sa victime, la surveille constamment, renforce la pression si cette dernière tente de lui échapper. De quoi rendre fou sa proie, et son lectorat. Si bien qu’il vient à penser que le célèbre architecte pourrait être le meurtrier, et le doute s’installe.
Le vrai manipulateur ne serait-il pas l’auteur lui-même ? JP Delaney met tout en œuvre pour qu’un coupable soit désigné… coupable qui s’avère innocent. Le romancier distille des secrets çà et là, au fil des pages. Au lecteur d’assembler les pièces du puzzle. Maintenu dans un état d’incertitude, il ne lâche pas le roman une seule seconde, afin de connaître l’épilogue de cette histoire particulière, où un autre personnage s’invite : la vérité. Emma criait au loup, en mythomane aguerrie. Une question se pose alors : qu’est-ce qui est vrai ou faux dans ce récit ? Le lecteur se méfie, doute, tout comme Jane au cours de son enquête. Une investigation sans réelle chute : si la fin est légèrement guidée par les dernières lignes du roman, le lecteur est en mesure d’imaginer sa propre issue.
Des règles absurdes, une maison minimaliste, des personnages complexes, The Girl Before est un thriller épatant. Avec ces plusieurs filles d’avant (Emma, Isabelle, puis Jane elle-même, puisque le cercle infernal recommence), JP Delaney insinue que la vie est une infinie succession de destins identiques. Flippant et brillant !
Résumé
Lorsqu’elle découvre le One Folgate Street, Jane est conquise par cette maison ultramoderne, minimaliste, parfaite pour tourner la page après le drame éprouvant qu’elle vient de vivre. Mais, pour la louer, il faut se plier aux règles draconiennes imposées par son architecte, Edward Monkford, aussi mystérieux que séduisant. Notamment répondre régulièrement à des questionnaires intrusifs.
Jane apprend bientôt qu’Emma, la locataire qui l’a précédée, lui ressemble étrangement et a connu une fin tragique. Irrémédiablement, Jane s’engage sur la même voie, fait les mêmes choix, croise les mêmes personnes… et ressent la même terreur que la fille d’avant.
L’auteur
JP Delaney est l’un des pseudonymes de Tony Strong (à moins que ce ne soit aussi un pseudonyme ?). Né en Ouganda en 1962, il a publié plusieurs romans à succès sous d’autres noms (Anthony Capella, Jonathan Holt). Auteur caméléon, il brouille les pistes. Ainsi, difficile de quantifier l’ensemble de son œuvre… The Girl Before, sa première incursion dans le thriller psychologique. Publié le 24 janvier 2017 aux Éditons Ballantine Books (États-Unis), le roman est sorti en France le 8 mars 2017, aux Éditions Mazarine. Le best seller est en cours d’adaptation par Imagine Entertainment, la compagnie de production de Ron Howard.